Les graffiti marins I
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Ce graffiti représente vraisemblablement une nef du XIVe ou du XVe siècle, tout comme celle du dessus. |
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Représentaton grossière d'une nef du XIVe ou du XVe siècle. |
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Le débarquement d'Édouard III en 1346.
Comment le roi d'Angleterre arriva en Normandie, Chroniques de Jean Froissart, chapitres 235 et 266.
Le roi d'Angleterre qui était alors en la fleur de sa jeunesse [...] s'inclina de grande volonté aux paroles de messire Godefroy de Harcourt, qu'il appelait son cousin. Si commanda à ses mariniers qu'ils tournassent vers Normandie et il même prit l'enseigne de l'amiral, le comte de Warwick, et voulut lui-même être amiral pour ce voyage, et se mit tout devant, comme patron et gouverneur de toute la navie et cinglèrent au vent qu'ils avaient à volonté.
Si arriva la navie du roi d'Angleterre en l'île de Cotentin, sur un certain port qu'on appelle la Hogue Saint Vaast.
Ces nouvelles s'espartirent sur la pays que les Anglais avaient là pris terre et vinrent messagers accourant jusques à Paris devers le roi de France, envoyés de par les villes de Cotentin.
Bien avait ouï recorder le roi de France en cette saison, que le roi d'Angleterre mettait sus une grande armée de gens d'armes, et [...] avait-on vu sur la mer des bandes de Normandie et Bretagne, mais on ne savait encore quelle part ils voulaient traire.
[...]
Or revenons au roi d'Angleterre qui était arrivé en la Hogue Saint Vaast, assez près de Saint-Sauveur-le-Vicomte, l'héritage de messire Godefroy de Harcourt.
Quand la flotte du roi d'Angleterre eut pris terre en la Hogue, et elle fut là toute arrêtée et ancrée sur le sablon, le dit roi issit de son vaisseau et du premier pied qu'il mit à terre, il chut si rudement que le sang lui vola hors du nez.
Adonc le prirent ses chevaliers qui delez lui étaient et lui dirent : "Cher Sire, retirez-vous en votre nef et ne venez mais hui à terre, car voici un petit signe pour vous". Dont répondit le roi tout pourvument et sans délai : "Pourquoi ? Mais c'est un très bon signe pour moi, car la terre me désire". De cette réponse furent tous réjouis.
Ainsi se logea le roi ce jour et la nuit, et encore le lendemain tout le jour et toute la nuit, sur le sablon.
Entremetes on déchargea la flotte des chevaux et de tout leur harnais et eurent conseil là entre eux, comment ils se pourraient maintenir [...].
Ils ordonnèrent leurs gens en trois batailles dont l'une irait d'un côté tout suivant la marine à destre et l'autre à senestre, et le roi et le prince son fils iraient par terre au milieu [...].
Si commencèrent à chevaucher et à aller ces gens d'armes ainsi que ordonné était. Ceux qui s'en allaient par mer selon la marine prenaient toutes les nefs, petites et grandes, qu'ils trouvaient et le emmenaient avec eux. Archers et gens de pied allaient de côté, selon la marine, et robaient et pillaient tout ce qu'ils trouvaient.
Et tant allèrent et ceux de mer et ceux de terre qu'ils vinrent à un bon port de mer et une forte ville que l'on appelle Barfleur et la conquirent tantôt, car les bourgeois se rendirent par doubte de mort. Mais pour ce ne demeura mie que toute la ville ne fut robée, et prins or, argent et riches joyaux ; car ils en trouvèrent si grande foison que garçons n'avaient cure de draps fourrés de vair ; et firent tous les hommes issir hors de leur ville et entrer ès les vaisseaux avec eux, parcequ'ils ne voulaient mie que ces gens se pussent rassembler, pour eux grever quand ils seraient passés outre.
Le débarquement d'Édouard III d'Angleterre en 1346.
Manuscrit du Corpus Christi College's Library, n° 370. Dans Cent cinquante textes sur la guerre de Cent Ans dans le bailliage de Cotentin, Archives Départementales de la Manche, Service éducatif, Annales du centre régional de documentation pédagogique de Caen, Maurice LANTIER, 1978.
Par l'habileté des matelots, le onze du mois de juillet, la flotte levait l'ancre par ordre du roi et se livra aux flots de la mer. Personne ne savait vers quel pays on faisait voile [...]. Les flots de la mer et les vents favorables amenèrent les navires dans l'île de Saint-Marcouf, dans le duché de Normandie [...].
Le douze, les habitants de l'île virent le spectacle terrible et subit de nos navires et, de peur, se précipitèrent dans les cavernes et les bois, abandonnant leurs biens, et prenant les voies les plus rapides fuyant devant le roi, ainsi que je l'ai appris depuis. À midi, celui-ci avec son armée s'empara du rivage, et atteignit une montagne voisine de la mer (la hauteur sur laquelle est l'église de Quettehou). L'illustre Édouard, prince de Galles, fils aîné du roi d'Angleterre, Guillaume de Montaigu, Roger de Mortimer, Guillaume le Roos, Roger de la Ware et Richard de la Vere, et en leur compagnie un grand nombre d'autres reçurent du roi la ceinture de chevalier.
On se répandit dans le pays, passant au fil de l'épée les fantassins ennemis et brûlant les bourgs et les habitations les plus luxueuses.
Pendant cette expédition du roi d'Angleterre, quatorze navires préparés soigneusement par le service de l'ennemi, trouvés sur la plage furent brûlés avec leur accastillage. Le roi et son armée montèrent sur une seconde hauteur plus élevée (La Pernelle) où tout le pays put apprécier l'importance des forces anglaises. Puis ils redescendirent pour se loger chacun à sa convenance, et prirent le gîte dans un petit bourg distant de deux milles du port de Saint-Vaast (Morsalines).
Le comte de Warwick, accompagné de son écuyer, avait dépassé les limites du cantonnement ; lorsque les ennemis, cachés dans une forêt voisine (le bois du Rabey) l'attaquèrent si brutalement qu'il se crut pris. Cependant, pour que ses adversaires ne puissent se réjouir d'un premier triomphe sur les Anglais, il sauta de son cheval avec son écuyer malgré la faiblesse de sa monture et tua quelques unes des assaillants. Les autres eurent peur, crurent que cet Anglais unique était devenu une armée et prirent la fuite.
[...]Cinquante soldats garde-côtes avaient été envoyés par l'adversaire des Anglais pour garder le port et le pays et étaient demeurés continuellement pendant dix semaines sur le rivage de la mer : mais le troisième jour de l'arrivée du roi, cette troupe manquant d'argent s'était retirée dans une autre direction.
Ensuite, le seigneur Robert Bertran, connétable de France, et les nobles et principaux de la presqu'île, ennemis du susdit roi d'Angleterre firent savoir à tous ceux qui était au-dessous d'un certain âge de se présenter en armes sous douze jours, afin de résister à l'attaque contre le sol natal. Mais ils virent l'ensemble de la flotte anglaise, sans attendre ces nouveaux hôtes, ils s'enfuirent rapidement laissant le passage en Normandie ouvert au roi et à son armée.
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